Deux ans, jour pour jour, après l’adoption du plan climat mondial à la COP21, pacte historique contre le réchauffement de la planète, plusieurs dizaines de dirigeants sont de nouveau à Paris ce mardi pour tenter d’accélérer une action climatique encore très insuffisante. Proposé par la France après l’annonce par Donald Trump du retrait américain de l’accord, ce One Planet Summit, co-organisé avec l’ONU et la Banque mondiale, sera consacré au sujet-clé du financement : comment orienter la finance mondiale vers les investissements verts, et notamment soutenir les pays du Sud. Au total, une cinquantaine de chefs d’État et de gouvernement sont annoncés sur l’île Seguin, à l’ouest de Paris : le Mexicain Enrique Peña Nieto, la Britannique Theresa May, le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, des présidents africains, le secrétaire général de l’ONU António Guterres… De grands émetteurs de gaz à effet de serre seront en revanche représentés à moindre niveau, ministériel pour la Chine, l’Inde, le Canada… Pour les États-Unis, ce sera un chargé d’ambassade ; mais des élus, entreprises, fondations viendront dire que « l’Amérique est toujours là ». Sont aussi attendus de grands acteurs mondiaux de la finance publique et privée, des ONG, et l’acteur américain Leonardo DiCaprio, actif militant écologiste. C’est « fêter un anniversaire par la preuve », avec un sommet « pragmatique et concret », mais « pas une conférence de donateurs », dit le gouvernement français.

Le pape François a souhaité dimanche que ce rendez-vous favorise « une claire prise de conscience sur la nécessité d’adopter des décisions réellement efficaces pour contrer les changements climatiques et, dans le même temps combattre la pauvreté ». Ce One Planet Summit arrive moins d’un mois après la COP23, la conférence annuelle de l’ONU sur le climat. Qu’en attendre de plus ? « Une COP, c’est le consensus multilatéral, ce sommet, c’est la mobilisation de ceux qui veulent aller plus vite », explique Laurence Tubiana, économiste et cheville ouvrière de la COP21. Au terme d’une année frappée par des ouragans record et des incendies jusque dans Los Angeles, une étude vient encore de réviser à la hausse les prévisions de réchauffement du dernier rapport des scientifiques du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat).

Réorienter les capitaux

En 2015, la communauté internationale s’est engagée à agir pour contenir le mercure sous le seuil critique de + 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle, mais les engagements nationaux pris entraînent toujours le monde au-delà de 3 °C. Beaucoup sont en outre conditionnés à la mise en place de financements. L’initiative New Climate Economy estime à 90 000 milliards de dollars d’ici à 2030 les besoins mondiaux en infrastructures durables. S’ils sont bien placés, ces investissements représenteraient à peine 5 % de plus que ce qui serait réalisé de toute façon. D’où l’importance de réorienter les capitaux. Les pays du Nord ont promis de porter à 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 leurs financements climat aux pays du Sud, qui réclament des assurances que la promesse sera tenue, en particulier pour pouvoir s’adapter aux impacts des dérèglements (digues, surélévation des habitats, système d’alerte météo, etc.).

Fin 2018, « les pays sont attendus à la COP24 pour relever leurs ambitions », rappelle Nick Nuttall, porte-parole du secrétariat climat de l’ONU. Mais cela « dépendra de leur appréciation quant à la disponibilité des capitaux ». Mardi matin, les échanges incluront ministres, maires, OCDE. L’après-midi, place aux dirigeants, avec des sessions menées par le Français Emmanuel Macron, le président de la Banque mondiale Jim Yong Kim et Antonio Guterres. Parmi les engagements qui pourraient être annoncés, des dons de fondations, des coalitions contre le charbon ou pour la neutralité carbone. Les ONG manifesteront mardi, place du Panthéon à Paris, pour demander aux bailleurs de cesser leur soutien aux projets d’infrastructures fossiles (gaz, pétrole, charbon, responsables de trois quarts des émissions). Selon un rapport d’Oil Change-Amis de la Terre-WWF-Sierra Club, banques de développement et institutions publiques liées au G20 dépensent annuellement 72 milliards de dollars dans des projets liés aux fossiles, quatre fois moins pour les énergies propres.

Le Point

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