A travers un communiqué conjoint, les ministères de l’administration du territoire et de la décentralisation, de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme, de l’environnement, des eaux et forêts, ont interdit la construction anarchique au niveau des bordures de mer.

Dans un entretien ce samedi 27 novembre, cet architecte d’Etat, Benoit Curtis, a salué cette décision des nouvelles autorités. Il est tout de même revenu sur les conséquences enregistrées par l’urbanisation anarchique dans la ville de Conakry, avant de proposer quelques pistes de solution.

« Les deux corniches (Nord et Sud, ndlr) qui jonchent la capitale Conakry sont la limite du littoral, c’est-à-dire entre les domaines publics maritimes et la ville. Donc ils l’ont séparé, et aujourd’hui qu’est ce qu’on constate, c’est ce que la limite entre la ville et le littoral est franchie par l’urbanisation anarchique, ce qui fait qu’aujourd’hui la population n’a pas accès au littoral, et lorsqu’une population n’a pas accès à un littoral, le littoral devient un dépotoir, et quand ça devient un dépotoir il devient sal. En dehors des types de déchets, l’élévation de la construction fait qu’entre la ville et le littoral, il n’y a aucune relation visuelle et si cette relation n’existe pas, la mer n’est pas bénéfique pour la ville. Donc vous constatez qu’il fait actuellement très chaud dans la ville de Conakry. Donc cette chaleur prouve qu’il y a une relation entre le littoral et le changement climatique ».  

Selon l’architecte, la ventilation en provenance de la mer vers la ville est subitement bloquée à travers l’intermédiation des bâtiments entre la terre ferme et la haute mer. Cela est contraire aux années précédentes.

« La partie bénéfique du littoral ou la mer c’est qu’elle amène de l’air à la ville de Conakry. Avant, dans les années 1980, on constatait à Conakry qu’il y avait une bonne ventilation, mais aujourd’hui on a créé une façade maritime qui fait qu’aujourd’hui cette ventilation naturelle est bloquée. Et si elle est bloquée par les bâtiments à hauteur, la ville ne bénéficie pas de cela et si elle ne bénéficie, c’est que dans cette relation entre ville, littoral et mer, c’est la ville qui subit les conséquences. Si elle subit ces conséquences, elle n’aura pas les bénéfices de la mer, donc en dehors des bénéfices de la mer, cette chaleur que nous ressentons actuellement, il faudrait des percées et ces percées sont dues à quoi, à des relations visuelles entre la ville et la mer. De tous les côtés du littoral, on doit avoir une vue sur la mer, mais c’est fermé aujourd’hui ».

Plus loin, cet architecte a souhaité que cette volonté des autorités ne se limite pas seulement à une prise de décision, mais qu’une solution soit apportée pour changer la donne.

« A toute chose il y a une solution. Sur la question du changement climatique ou du développement durable, on parle d’adaptabilité. Quelle solution faudra-t-il apporter de telle sorte que la ville bénéficie des avantages de la mer à travers le littoral et que le littoral aussi permet à la ville d’être à l’aise. En même temps, qu’on rende la mer à sa population, rendre la mer à la population, ça veut pas dire de tout dégager mais de créer des activités en relation avec la mer et le littoral qui pourraient amener les populations vers le littoral, ça permettrait de les protéger, ça éviterait l’urbanisation anarchique mais ça permettrait aussi une construction au niveau de ce littoral sans quoi ça ne serait pas du tout possible, et nous allons toujours subir ces conséquences ».

L’architecte d’Etat, Benoit Curtis invite les autorités a prendre toutes les dispositions nécessaire afin de réinstaurer le littoral guinéen pour donner un nouveau souffle à la ville de Conakry qui en est la principale victime.

« Pour prendre une décision, il faut d’abord l’analyser. Une solution n’est pas mauvaise, mais quelle solution devons nous apporter ? Parce que la nature a  horreur du vide. Quand on prend une décision il faudrait proposer quelque chose. Et aujourd’hui quand on prend Conakry du point de vue urbanisation c’est carrément anarchique, on fait ce qu’on veut. Comme j’aime souvent à le dire, la mer et le littoral sont le bien public, ça appartient aux pauvres et aux riches, il n’appartient pas qu’à ceux qui ont les moyens qui empêchent ceux qui n’ont pas les moyens à travers l’urbanisation. Cette décision est salutaire, il va falloir aller de l’avant et faire une proposition pour que le littoral reviennent à la ville, voila la question qu’il faut poser ».

Il faut rappeler que depuis plusieurs années, la construction anarchique dans les zones côtières de Conakry ne fait qu’accroitre, malgré de multiples dénonciations faites par les acteurs de la société civile.  

A suivre…

Sylla Youn, pour earthguinea.org

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