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Filière bois : Le président de la fédération nationale à bâton rompu avec Earthguinea

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Depuis le 11 juin 2021, les autorités guinéennes ont sorti un communiqué interdisant la coupe et le transport de bois sur toute l’étendue du territoire national. Quelques mois après la mise en application de cette décision, le marché guinéen de bois a connu sitôt une pénurie sans précédent. Face à ce constat, les professionnels de la filière bois ont engagé une série de démarches pour interpeler le gouvernement sur sa décision. Pour soulager ces derniers, les autorités ont publié le 14 janvier 2022 un arrêté portant l’approvisionnement du marché local en bois d’œuvre pour assister la population.

Dans un entretien accordé à la rédaction de notre site earthguinea.org, le président de la Fédération nationale des professionnels de la filière bois, Ansoumane Camara, est prêté à nos questions concernant cette levée partielle.

On vous propose ci-dessous l’intégralité de l’entretien.

Earthguinea : Dites-nous Monsieur Camara, où en sommes-nous avec cette autorisation partielle de transport de bois du lieu de stock vers le marché local?

Ansoumane Camara : Quand on parle de l’interdiction de la coupe et le transport de bois sur toute l’étendue du territoire national, c’est que cette interdiction date du 11 juin 2021, la décision reste et demeure toujours en vigueur. Ça veut dire que les nouvelles autorités n’ont jamais levé cette interdiction de la coupe et le transport du bois. Nous avons quand même bénéficié d’une certaine libéralisation de nos activités qui a été accordée le 14 janvier 2022, suite à l’organisation des journées de réflexion sur l’exploitation forestière, qui s’est tenue les 22 et 23 décembre 2021, mais jusqu’à présent l’interdiction demeure.

Depuis que vous avez reçu l’autorisation d’approvisionner le marché local, dites-nous, comment se porte le marché ?

D’abord suite à cette interdiction du 11 juin 2021, il y a eu une pénurie sur le marché qui ne dit pas son nom. Il y a eu la flambée du prix de bois, il y a eu aussi le chômage à plusieurs niveaux de nos ateliers de menuiserie, même dans certains industries de tôle, de pointe et de contreplaqué. Et vous n’êtes pas sans savoir que le bois qui a une très grande importance dans la vie sociale à tous les niveaux. Donc aujourd’hui suite à cette levée partielle que la ministre de l’environnement et le développement durable a autorisée en janvier, nous avons pu approvisionner le marché. Il y a de la ressource, il y a des bois aujourd’hui sur le marché. Mais nous avons de sérieuses inquiétudes parce que si l’autorisation de la coupe n’a pas été faite, nous n’allons jamais approvisionner nos marchés comme nous le voulons. Alors aujourd’hui, après cette levée partielle, quand il y aura la crise nous ne le souhaitons pas, il y aura encore l’augmentation de prix du bois, il  y aura encore la pénurie sur le marché. Donc notre souhait est que les nouvelles autorités acceptent que l’on autorise l’exploitation forestière pour la consommation locale.

Selon notre information, on vous a interdit de couper les bois jusqu’à ‘’nouvel ordre’’, pendant qu’on autorise la Forêt forte à exploiter les forêts. En tant que président de la filière, comment vous accueillez cette décision ?

Tout récemment on a reçu les actes qui ont autorisé la forêt forte à la reprise de la coupe du bois, mais nous on n’a pas été associé à cela, on n’a pas été informé officiellement par le ministère de tutelle, je veux parler du ministère de l’environnement et le développement durable. Mais finalement à travers les informations, nos démembrements qui sont dans la région forestière nous ont informés formellement avec les documents à l’appui que la forêt forte a repris la coupe du bois. Pourtant nous les guinéens, nous ne sommes pas autorisés à couper le bois. Donc l’interdiction de la coupe des bois par les guinéens demeure jusque là où je vous parle.

Comment vous analysez cela ?

Notre analyse, c’est que nous sommes vraiment très surpris par cela. C’est une inquiétude pour nous parce que la forêt forte qui exploite et qui exporte ses produits, tels que les contreplaqués, les produits finis et tout, les 99% sont exportés, et que les guinéens qui doivent transformer ici en Guinée pour les besoins de consommation de la  population locale, ceux-ci ne sont pas autorisés à exploiter. C’est-à-dire que l’étranger qui exploite et qui exporte vers les autres marchés lui il est autorisé à le faire donc c’est une inquiétude à ce niveau.

Voulez-vous dire que c’est une sorte d’injustice à l’égard des guinéens ?

En tout cas les autorités doivent revoir cette situation, parce que ça ne peut pas continuer comme ça. Qu’on autorise une société qui exporte ses produits, et les guinéens qui transforment et qui font la consommation locale ceux-ci ne sont pas autorisés. C’est ce qui fait aujourd’hui que le prix du bois n’arrive pas là où nous voulons que ça arrive pour être à la portée des guinéens.  

Monsieur le président, vous n’êtes pas sans savoir que la coupe abusive de bois a une conséquence directe sur l’environnement, surtout dans le cadre du changement climatique. Quelle solution envisagez-vous au sein de votre fédération pour atténuer les dégâts causés?

Vous savez, l’exploitation forestière à tous les niveaux joue sur l’environnement. Il faut le reconnaitre. Il y a au moins 13 corps de métier qui agissent directement contre notre environnement. Mais quand vous parlez de l’exploitation forestière, la coupe proprement dite, chez nous la coupe est mieux organisée. Il y a la coupe sélective, la coupe qui aura un impact très faible sur l’environnement, on aura coupé seulement que les bois qui sont en maturité. Vous savez l’arbre c’est un être, il naît, il grandit, si nous ne les valorisons pas, il meurt. Mais quand l’arbre est en maturité, vous l’exploitez de façon réglementaire ça a un impact faible sur l’environnement. Mais pour pallier à cela, nous, notre stratégie n’est autre qu’il faut procéder à la restauration des zones dégradées. Donc de 2015 à nos jours, notre fédération a déjà reboisé sur fonds propre 675 hectares à travers des cotisations organisées par la fédération. Donc chaque année  nous procédons à la restauration du couvert végétal dans les zones où nos activités sont intenses.

Quelle est votre collaboration avec le ministère de tutelle, je veux parler du ministère de l’environnement et le développement durable ?

Le ministère de l’environnement est notre partenaire direct  dans le cadre de l’exploitation forestière et le transport du bois. Il y a des directions techniques avec qui nous travaillons directement, qui sont : la direction nationale des forêts et faunes, l’Office guinéen du bois, ce sont nos collaborateur directs. La direction nationale des forêts et faunes, c’est eux qui gèrent l’exploitation forestière. Et l’Office guinéen de bois, ce sont eux qui gèrent tout ce qui concerne le transport du bois. Mais aujourd’hui en a des difficultés. Il faut parler de l’exploitation forestière quand les permis sont délivrés. Mais aujourd’hui les permis ne sont pas délivrés. Il faut parler carrément pour que l’office guinéen de bois soit dans son rôle. Il faut qu’il y ait la délivrance des bordereaux de route délivrés par les démembrements, c’est-à-dire les chefs d’antenne qui sont dans les différentes zones d’exploitation. , aujourd’hui nous travaillons avec des documents d’autorisation spéciale qui permet simplement de prendre des stocks de bois qui sont déjà coupés et d’envoyer vers les zones de consommation.

Votre mot de la fin ?

Je voudrais saluer tous les cadres du ministère de l’environnement et le développement durable, à travers madame la ministre. Je leur demande surtout d’accepter et de procéder à la mise en œuvre des journées de recommandation et de réflexion organisée par le ministère a Nzérékoré les 22 et 23 décembre 2021. Le jour d’aujourd’hui quoique nous fassions il faudrait qu’on aille vers la réglementation forestière dans l’exploitation. Parce que le bois est une denrée de première nécessité, c’est un produit consommable. Alors si nous n’avons pas ce produit ça joue sur beaucoup de secteurs dans le cadre du développement social. Si vous prenez par exemple la construction des bâtiments, les couvertures, la fabrication des meubles, il y a plusieurs secteurs dont leur vie est liée au bois. Nous qui sommes les acteurs directs, c’est des milliers de guinéens ou de familles qui vivent grâce à ces bois, mais nous sommes pour le respect des textes réglementaires. Si vous voyez qu’on a mis notre organisation en place qui joue le rôle d’interface entre l’administration et les acteurs, c’est pour vous dire que nous voulons accorder du sérieux, et nous voulons la pérennisation de notre activité.

Entretien réalisé par Sylla Youn, pour earthguinea.org

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